Question posée le 01/10/2018

Bonjour,

Votre question fait référence à des propos tenus par Valérie Pécresse sur RTL au Grand Jury, ce dimanche 30 septembre. Elle s’est ainsi prononcée en faveur d’un «doublement des peines pour les crimes commis dans les quartiers les plus criminogènes». Selon elle, pour que la mesure soit constitutionnelle, il faut le faire «en disant que c’est une circonstance aggravante, dans le fait de commettre un crime dans certains quartiers».

L’élue LR explique par ailleurs que «c’est ce qu’ils font au Danemark», citant une mesure qui aurait été prise par le centre droit au pouvoir. Interrogée sur le risque de stigmatisation d’une telle loi, Pécresse a par ailleurs estimé que ce n’était pas le cas : «Ce n’est pas de la stigmatisation. C’est quand même dingue que dans certains départements de France, il y ait beaucoup plus de crimes, et beaucoup moins de sanctions.»

«Contraire au principe constitutionnel d’égalité devant la loi pénale»

Contacté par Check News, le porte-parole du ministère de la Justice considère de son côté que cette proposition, «à ce stade très général», semble bel et bien «contraire au principe constitutionnel d’égalité devant la loi pénale».

«C’est au seul juge d’apprécier, selon les circonstances dans le cadre de son pouvoir d’individualisation, mais au regard d’un maximum légal unique quel que soit le lieu de commission des faits, s’il doit être ou non plus sévère. Seules des circonstances de faits purement objectives, et applicables de manière identique sur l’ensemble du territoire (par exemple commission de violences dans ou aux abords d’établissement d’enseignement) peuvent justifier une aggravation légale de la peine», estime-t-on place Vendôme.

Un projet danois qui n’a pas encore été voté

Concernant le Danemark, Valérie Pécresse évoque un projet de loi porté par le ministre de la justice, Søren Pape Poulsen (Parti populaire conservateur), qui prévoit effectivement le doublement des peines pour certains crimes s’ils sont commis dans un des 25 quartiers classés comme «ghettos».

Mais contrairement à ce que laisse entendre la Présidente du conseil régional d’Ile-de-France, la loi n’a pas encore été votée. «Le gouvernement a présenté le projet mais il n’a pas encore été discuté au parlement. La mesure fait partie d’un ensemble de propositions qui visent à lutter contre ce qu’ils appellent les "ghettos". Certaines mesures ont déjà été votées au printemps mais pas celle concernant le renforcement des peines dans certaines zones. Celle-ci a d’ailleurs été très critiquée», précise à Check News Nikolaj Rodkjær Kristensen, journaliste et fact-checker danois au Mandag Morgen.

C’est le cas par exemple de Kirsten Ketcher, professeure à la faculté de droit de l’Université de Copenhague, qui estime que la proposition crée une rupture de l’égalité devant la loi. Une critique balayée par le ministre de la justice danois qui estime que la mesure vise «le lieu où le crime est commis et non celui où la personne vit». La mesure devrait être présentée au parlement à l’automne.

Cordialement,

Vincent Coquaz