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19 février 2024 1 19 /02 /février /2024 21:03
Affaire Adama Traoré : la décision
concernant la contestation
du non-lieu sera rendue le 16 mai

Dans son réquisitoire, le parquet général reconnaît un « lien de causalité » entre l’interpellation et la mort du jeune homme en 2016, mais estime que l’usage de la force par les gendarmes était proportionné.

Par Luc Bronner  Publié aujourd’hui  19/02 à 17h10


https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/02/19/affaire-traore-la-decision-sur-la-contestation-du-non-lieu-connue-le-16-mai_6217367_3224.html

Lors d’une manifestation en souvenir d’Adama Traoré, à Paris, le 8 juillet 2023. Lors d’une manifestation en souvenir d’Adama Traoré, à Paris, le 8 juillet 2023. BERTRAND GUAY / AFP

Le dossier judiciaire de l’affaire Adama Traoré n’est pas complètement clos. Après l’ordonnance de non-lieu rendue, fin août 2023, par trois juges d’instruction, la famille du jeune homme mort le 19 juillet 2016 au cours d’une interpellation par des gendarmes, à Beaumont-sur-Oise (Val-d’Oise), avait déposé un appel, examiné jeudi 15 février par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris. La décision, dans un dossier emblématique des débats et des controverses autour des violences policières, sera rendue le 16 mai.

 

Dans son réquisitoire, consulté par Le Monde, le parquet général a pour sa part reconnu, de façon explicite, le lien entre l’intervention des gendarmes et la mort du jeune homme. « A l’issue de l’instruction, et de nombreuses expertises réalisées, le lien de causalité entre les manœuvres réalisées par les militaires de la gendarmerie et le décès de monsieur Traoré paraît établi », note le procureur général. Le magistrat retient néanmoins de ces expertises que, avant son interpellation, Adama Traoré « souffrait d’une hypoxie sévère et un processus létal était déjà enclenché, lié à un coup de chaleur ».

La mesure de contrainte opérée par les gendarmes a aggravé son état de santé, reconnaît-il donc, sans être l’unique cause du décès : « Cette asphyxie de contrainte, compte tenu de sa courte durée et des modalités d’intervention des forces de l’ordre, n’aurait pas dû avoir une issue fatale. De multiples facteurs ont conduit au décès de monsieur Traoré, qui était déjà très affaibli au moment de l’intervention des forces de l’ordre, la première cause létale étant le coup de chaleur. »

Circonstances décisives

L’argumentaire du parquet pour défendre le non-lieu rendu par les juges d’instruction repose sur le caractère « proportionné » de la force utilisée par les gendarmes afin d’interpeller Adama Traoré. Les circonstances de l’interpellation sont en effet décisives aux yeux du parquet. Le 19 juillet 2016, des gendarmes en patrouille avaient cherché à contrôler Adama Traoré et son frère Bagui, recherché dans le cadre d’une enquête pour vol avec violence.

Adama Traoré avait pris la fuite, échappant à une première tentative d’interpellation dans un jardin public grâce à l’intervention d’un ami, lequel avait bousculé les militaires qui commençaient à le menotter. Adama Traoré avait été retrouvé, dans un second temps, caché dans un appartement après avoir été signalé par un habitant effrayé par l’irruption du jeune homme avec des menottes.

 

Les gendarmes avaient fait état de rébellion et de résistance de sa part à l’intérieur de l’appartement. « Nous nous jetons sur lui avec mes deux collègues », avait déclaré l’un des fonctionnaires. « On se trouvait à trois dessus pour le maîtriser », avait ajouté un autre militaire. Devant les juges, les gendarmes avaient finalement expliqué qu’« Adama Traoré n’avait pas eu à supporter leurs trois poids respectifs simultanément » – ces dernières déclarations avaient conduit les juges à considérer leur usage de la force nécessaire et proportionné.

Argumentaire rejeté

Le parquet suit un raisonnement similaire à celui des juges d’instruction, insistant sur le fait que le recours à la force était justifié. « Le comportement actif, volontaire et tonique de monsieur Traoré, à savoir sa capacité à prendre la fuite à deux reprises en courant, sa capacité à résister à une première interpellation, pouvait largement laisser penser qu’il était en possession de ses moyens physiques au moment où les trois militaires l’ont physiquement appréhendé », relève ainsi le procureur.

« Il apparaît que cette force était proportionnée à la situation de résistance qu’opposait monsieur Traoré, puisqu’il refusait de répondre aux injonctions, et que, comme l’ont indiqué les gendarmes, il raidissait ses bras sous son corps et agitait ses jambes », précise le parquet général, en soulignant qu’aucune trace de violence n’a été constatée sur le corps du jeune homme.

 
« Après huit ans de mauvaise foi judiciaire, la justice reconnaît enfin que l’interpellation violente des gendarmes a causé la mort d’Adama Traoré. Si la chambre de l’instruction respectait la loi, les gendarmes seraient renvoyés devant une juridiction pour être jugés », a réagi l’avocat de la famille Traoré, Me Yassine Bouzrou. Dans son réquisitoire, le procureur a rejeté l’argumentaire de la famille quant à l’accusation de non-assistance à personne en danger au moment où Adama Traoré perdait connaissance, à la fin de son transfert vers la gendarmerie.
 
 

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