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5 octobre 2018 5 05 /10 /octobre /2018 06:47
Affaire Adama Traoré : l'expertise médicale de synthèse disculpe les gendarmes
Par Ismaël Halissat 4 octobre 2018 à 18:34
https://www.liberation.fr/france/2018/10/04/affaire-adama-traore-l-expertise-medicale-de-synthese-disculpe-les-gendarmes_1683200
 

Selon les médecins, le jeune homme, mort en juillet 2016 lors de son interpellation, souffrait d'une maladie du sang et la compression thoracique qu'il a subie n'a pas de lien avec son décès.


Le collège d’experts affirme maintenant sans ambiguïté que la mort d’Adama Traoré résulte de «l’évolution naturelle d’un état antérieur» et que la «compression thoracique […] n’a pas eu de rôle dans la survenue du décès». Selon ce rapport médical final, dévoilé par le Monde auquel Libération a également eu accès, la technique d’interpellation de plaquage ventral utilisée par les trois gendarmes pour interpeller Adama Traoré n’a donc pas provoqué la mort, comme le soutient la famille du jeune homme et l’avocat Yassine Bouzrou depuis le début de l’affaire.
«Il a pris le poids de nos trois corps»

Interrogés dans la foulée du décès, les agents décrivaient effectivement aux enquêteurs une interpellation violente. «Nous nous jetons sur lui avec mes deux collègues, indiquait le gendarme le plus expérimenté. Nous avons employé la force strictement nécessaire pour le maîtriser mais il a pris le poids de nos corps à tous les trois au moment de son interpellation.» Un autre confirmait la scène : «On se trouvait à trois dessus pour le maîtriser.»

Dès l’annonce du décès, l’état de santé d’Adama Traoré fait l’objet d’une communication erronée de la part du procureur de la République de Pontoise en poste à l’époque. Après la première autopsie, le parquet déclarait que le jeune homme souffrait d’une «infection très grave touchant plusieurs organes». Pourtant, cet examen faisait seulement mention «de lésions d’allure infectieuse». Le procureur évoquait aussi un «malaise», semblant tout de suite balayer une éventuelle responsabilité des gendarmes.

Le chemin judiciaire pour parvenir à cette dernière expertise de synthèse a été particulièrement laborieux. Après des conclusions parfois divergentes entre les différents examens précédents (deux autopsies et deux rapports d’étude des organes et des tissus), cette expertise de synthèse est finalement ordonnée en janvier. Puis fait l’objet d’un report en mai, avant de finalement aboutir après neuf mois.

Détresse respiratoire

Dans leur synthèse, les quatre médecins commencent par écarter clairement certaines hypothèses développées dans les précédentes expertises. Adama Traoré ne souffrait notamment d’aucune pathologie cardiaque bien qu’il présentait un cœur un peu plus gros que la moyenne. Cet élément qui a dans un premier temps été interprété comme le symptôme d’une éventuelle pathologie est finalement mis sur le compte d’une pratique sportive fréquente.

Les experts s’accordent ensuite sur le fait qu’Adama Traoré souffrait d’une drépanocytose, une maladie du sang, ainsi que d’une sarcoïdose pulmonaire, maladie inflammatoire, «dont l’importance l’expose particulièrement à un risque d’hypoxémie [manque d’oxygène, ndlr] d’effort». C’est justement ce qui arrive le jour de la mort du jeune homme, selon les médecins. Lors de la course-poursuite avec les gendarmes, Adama Traoré «est exposé à un effort et à un stress intenses tandis que la température ambiante est particulièrement élevée». S’appuyant sur le témoignage de la personne chez qui il se cache, les médecins affirment que le jeune homme arrive alors «en état d’hypoxémie manifeste avec détresse respiratoire», une situation qui contribue à déclencher une «crise drépanocytaire aiguë avec syndrome thoracique, mécanisme ultime conduisant au décès». Les médecins concluent que «le décès de monsieur Adama Traoré résulte donc de l’évolution naturelle d’un état antérieur au décours d’un effort».

Episode d’effort et de stress

Une analyse aujourd’hui contestée par l’avocat Yassine Bouzrou qui relève dans ces observations que rien ne permet dans la procédure d’affirmer que lors de sa fuite Adama Traoré a fourni un effort «intense» pendant quinze minutes comme l'indiquent les médecins. Pendant ce laps de temps, Adama Traoré prend la fuite une première fois, échappe à une première interpellation, reprend la fuite, puis se cache dans un appartement. «Au total, entre la première et la deuxième course poursuite, [il] a donc parcouru une distance de 437 mètres sur une durée de 18 minutes», estime l’avocat. Bien éloigné selon lui, d’un effort trop important. «Le seul épisode d’effort et de stress ayant vécu à proximité immédiate de son décès est l’interpellation», affirme Yassine Bouzrou. Mais sur ce point, les experts sont également formels : «Non, [la compression thoracique] n’a pas eu de rôle dans la survenue du décès.»

Les experts vont même jusqu’à affirmer qu’il n’y avait rien à faire pour sauver Adama Traoré à la vue du mécanisme ayant conduit à sa mort : «Dans les meilleures conditions imaginables, et même lorsque l’arrêt cardio-circulatoire survient en milieu hospitalier ou en unité de soins intensifs, le pronostic décrit est le décès. La réanimation est inefficace.»

A lire aussi :Mort d’Adama Traoré : ce que conclut vraiment la nouvelle expertise médicale

Ismaël Halissat
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