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25 novembre 2019 1 25 /11 /novembre /2019 07:17

https://reporterre.net/Nous-avons-visite-Milipol-le-salon-de-la-repression

Nous avons visité Milipol, le salon de la répression

21 novembre 2019 / Émilie Massemin (Reporterre)

Le salon « de la sécurité intérieure » Milipol a ouvert ses portes mardi au nord de Paris. Reconnaissance faciale, lanceurs de balle de défense, aspirateurs à données téléphoniques... Reporterre s’est renseigné sur les nouveautés du secteur, qui raffine sans cesse les outils de surveillance et de répression.

(...)

PGM Précision fait partie des 1.005 exposants présents à Milipol, le salon mondial dédié à la sûreté et à la sécurité intérieure des États, qui tient sa 21e édition du mardi 19 au vendredi 22 novembre au parc des expositions de Villepinte (Seine-Saint-Denis). Des entreprises venues d’une vingtaine de pays, parmi lesquels la Chine, Israël et la Turquie, y tiennent un stand. Cette année, quelque 30.000 visiteurs accrédités des secteurs public (ministère de l’Intérieur, douanes, fonctionnaires de la défense, de la justice...) et privé (fabricants, sociétés de services, distributeurs…), fouleront les moquettes synthétiques du salon et pourront y tester gilets pare-balles, lanceurs de balles de défense et dispositifs de reconnaissance faciale dans une ambiance high tech et feutrée.

Le secteur est florissant. Fin 2018, le marché mondial de la sécurité affichait une croissance insolente de 7 %, bien supérieure aux 2 % de croissance mondiale, pour atteindre un chiffre d’affaires de 629 milliards d’euros. En France aussi, les entreprises dites « de la sécurité » se portent bien : leur chiffre d’affaires a progressé de 3,2 % en 2018 et atteint 29,1 milliards d’euros. À une nuance près : les dépenses consacrées à la sécurité intérieure de l’État (contrôle des identités, contrôle des frontières, équipements de maintien de l’ordre…) ont crû de 0,5 % seulement. « Un certain rebond pourrait intervenir en 2019 et en 2020 », indique toutefois Patrick Haas, directeur du journal spécialisé En toute sécurité, interviewé pour le dossier de presse du Milipol. « Certains créneaux sont plus porteurs, comme la détection de produits dangereux, en raison de la persistance des attaques ou des menaces terroristes, ou les équipements de maintien de l’ordre à cause du mouvement des Gilets jaunes. »

En visite pour inaugurer le salon mardi, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a présenté la « violence dans le maintien de l’ordre » comme une des « menaces fortes » auxquelles sont confrontés « la France et ses alliés », au même titre que le terrorisme, le trafic de drogues et les cyber-attaques. « Nous assistons à une radicalisation des mouvements contestataires nés en 1999 à l’occasion d’un sommet de l’OMC à Seattle et consacrés en 2001 lors du sommet du G8 à Gênes », a-t-il déclaré lors de son discours d’inauguration du salon, face à un public costumé à 95 % masculin, pendant que des serveurs distribuaient flûtes de champagne et petits fours. « Depuis, chaque rassemblement international est émaillé de violences. Il a fallu toute la mobilisation de nos forces et la coopération internationale pour que le sommet du G7 de Biarritz, en août dernier, se déroule bien et soit un succès diplomatique. "

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Un logiciel capable d’aspirer toutes les données d’un téléphone en moins de dix minutes

En revanche, dès qu’il ne s’agit plus d’armes risquant de blesser des manifestants, les langues se délient. La police nationale a énuméré à Reporterre toutes ses innovations présentées sur le salon : outil de détection des hackers, dispositifs de lutte anti-drones du Raid, drone filaire de la police aux frontières, laboratoire mobile d’analyse de la fraude documentaire… et certainement le plus attendu, le « kiosque » de l’entreprise Cellebrite, logiciel capable d’aspirer toutes les données d’un téléphone portable en moins de dix minutes. « Actuellement, les téléphones saisis doivent être envoyés dans un centre spécialisé de la police technique et scientifique, qui ne sont que 35 et sont souvent embouteillés. Avec ce kiosque qui sera installé dans les commissariats de premier niveau, il suffira de brancher le téléphone et toutes les données seront extraites pendant la garde à vue : SMS, photos géolocalisées… Autant d’informations qui peuvent être utiles pour conduire l’interrogatoire », vante Clémence Mermet-Grenot, du service de la criminalité numérique.

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« Il y a en France 25.000 fichés S, il serait très facile de tous les écouter »

Les exposants sont moins prolixes lorsqu’il s’agit d’obtenir des informations sur un autre dispositif de surveillance de masse, les IMSI-catchers capables d’intercepter le trafic des communications mobiles, de récupérer des informations à distance ou de pister les mouvements des utilisateurs des terminaux. Un constructeur allemand, Rhode & Schwarz, a expliqué ne pas en présenter en salon « pour éviter qu’il soit pris en photo, on préfère qu’il reste secret » et a invité Reporterre à envoyer un courriel pour en savoir plus sur ses clients. « On ne l’utilise pas, c’est interdit par la réglementation », a assuré la gendarmerie. Pourtant, son utilisation est définie dans un cadre légal depuis 2015 et la réforme de la loi pénale de juin 2016 et un appel d’offres d’avril 2019 de la gendarmerie et de la police nationale inclut cet équipement controversé.

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VERS UN « CONTINUUM ENTRECURITÉ RÉGALIENNE ETCURITÉ PRIVÉE »

« Les menaces globales nous touchent tous, nous devons agir fortement ensemble. Le continuum de sécurité doit être fait d’actes et de projets concrets. L’État et le secteur de la sécurité intérieure doivent agir ensemble, car la sécurité privée agit également pour la protection des Français, a déclaré le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner lors de son discours d’inauguration. Pour les grands événements comme les Jeux olympiques de 2024, un partenariat est indispensable. »

Cette déclaration s’inscrit dans la continuité d’un rapport de septembre 2018 des députés En Marche ! Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue, qui préconisent un « continuum » entre les forces régaliennes, les polices municipales et la sécurité privée, une meilleure coordination et un élargissement des compétences des entreprises de sécurité privée. Avec, en son cœur, une question hautement sensible : faut-il donner la possibilité aux agents de police privée d’intervenir sur la voie publique, ce qui leur est interdit à ce jour ?

Cette évolution serait dans le prolongement de la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique qui autorise pour la première fois l’armement des agents de sécurité privée, ce qui était interdit à de très rares exceptions (protection des installations nucléaires notamment) : armes de catégories D comme des bâtons de défense, des matraques télescopiques, des tonfas ou des aérosols pour les agents de surveillance « classiques », et fusils et aux armes de poing pour les agents de la « surveillance armée ».

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